L’homme cheval
by on avril 25, 2017 in Non classé

Conversation surprise l’autre soir dans une taverne avant le premier tour circassien :

Un quidam : – De retour de Puivert où coule la musica mondina, les joutes et les tournois,
Je joignis mes pas à ceux d’un Parfait. Bonhomme venant de l’Albigeois.
Tout du long, comme vous, il m’expose les principes de votre religion.
C’est ainsi que j’en appris l’essentiel.
Comme ce voyage de l’âme à travers les corps.
Pour appuyer ses dires, il y ajoute sa propre histoire :
Il se souvient de ce temps où chacun de ses propres fers martelle l’espace.
Plan segur, era un chivau ! Il vivait en cheval !
Son cavalier lui faisait parcourir un immense fief, du lever jusqu’au coucher.
Nulle touffe de thym, nulle poussière de pierre ignore l’empreinte de ses sabots.
Comme le sang vital, jamais le seigneur ne s’arrête ; jamais l’animal ne se fatigue.

Jusqu’au jour où, passant près de cet arbre, il se coince la jambe, se meurtri les boulets, perd son fer.
Dès lors, la bête ne peut plus se mouvoir sous les nuages.
Claudiquant, elle parvient tant bien que mal au château, où son maître l’abandonne à la fièvre, … à la mort.
Délivrée de ce corps de souffrance, l’âme s’élève.
Elle s’attarde bien quelques siècles aux histoires des hommes.
Puis estimant que son heure est venue, elle choisit la peau d’un homme bon.

Mais jamais l’homme n’oublia le cheval, ni l’endroit où fut perdu son trésor. Ce fer, qui pour lui, valait plus que de l’or. Tel qu’il me l’a décrit, nous sommes en ce lieu ce jour d’hui!

Traduction :

Tornava de Puegvèrd òm jogla musica mondina.
Ei rencontrat un Bon Òme de l’Albijés.
Per lo camin me contava sa religion : lo viatge de l’alma que truca al còs.
M’ha contat son ìstoria quan fòu un fèr batallant l’espaça.
Plan segur era un chivau !
Amb son cavalièr passava per las terras, passava a través los quèrs,
Del levar del solelh a son sòmi.
Jamai se fatiga, jamai posa lo pè.
Jos un jorn, prop d’aquèl pibol traucat, se meurtrissi la camba e perdia son fèr.

E l’alma perdia son hèr de libertat

Lo mestre l’abandona a la malaltia, a la dolor, a la mort.
Delivrat del còs, l’alma s’envòla cèl adalt.
E puei un segle desprès, chauzia la pèl d’un Bon Òme.
Aquel companhon de rota que totjorn marcha pel camin de la vida,
Per consolar a totis.

E l’alma perdia son hèr de libertat

J. G-S

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